Ban Ki-moon engagé en Côte d`Ivoire, pas sans risque selon les analystes
NEW YORK (Nations unies)- Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, mène une diplomatie particulièrement engagée concernant la Côte d`Ivoire et même agressive à l`égard du président sortant Laurent Gbagbo, mais elle n`est pas sans risque, soulignent les analystes.
"Ban a été plus engagé personnellement (sur la Côte d`Ivoire) que sur tout autre problème", souligne un responsable de haut rang de l`ONU.
M. Ban a plusieurs fois sommé Laurent Gbagbo de céder la place à son rival Alassane Ouattara. "Toute autre solution serait une parodie de démocratie et de l`état de droit", avait déclaré le secrétaire général de l`ONU à la mi-décembre.
Dans la nuit de samedi à dimanche, M. Ban a assuré d`un soutien "indéfectible" Alassane Ouattara, reconnu par la communauté internationale comme le président élu de Côte d`Ivoire, à l`issue du second tour de la présidentielle le 28 novembre.
Il a appelé M. Gbagbo "à respecter la volonté du peuple ivoirien" et "à se retirer afin que le président élu Ouattara puisse assumer son mandat". Il lui a demandé "de faire ce qu`il doit faire pour le bien de son pays et de coopérer pour une transition politique sans heurts dans le pays".
A M. Gbagbo qui a plusieurs fois demandé le retrait des quelque 9.500 Casques bleus de Côte d`Ivoire, M. Ban a répondu par la négative assurant que l`Onuci mènerait son mandat à son terme.
"Je dirais que Ban a été inhabituellement énergique sur la Côte d`Ivoire, même si son courage reflète le fait qu`il sait que la France, les Etats-Unis, la Cédéao (Communauté économique des Etats d`Afrique de l`Ouest) et même la Chine soutiennent sa ligne dure à l`égard de Gbagbo", souligne Richard Gowan, expert en sécurité multilatérale au Centre de coopération internationale de l`Université de New York.
"Mais si les dirigeants africains ne réussissent pas à persuader Gbagbo de se retirer, Ban aura très peu de marge de manoeuvre", souligne-t-il.
"Le pire des scénarios serait que Gbagbo arrive à survivre à la crise, humiliant l`ONU et Ban personnellement. Cela enverrait le message que les forces de maintien de la paix n`ont pas de soutien politique et peuvent être ignorées", dit-il.
Ce scénario peut encore être évité si les Etats-Unis, l`Union africaine et l`Union européenne sont prêts à forcer Gbagbo à partir, selon lui.
En prenant parti ouvertement et fermement pour M. Ouattara, M. Ban Ki-moon a peut-être surpris, souligne John Campbell, chercheur au Council on Foreign Relations, un centre de réflexion basé à New York.
Mais, souligne-t-il, "les élections, bien qu`imparfaites, étaient crédibles et Ouattara est vraiment le président de la Côte d`Ivoire. Il me semble que le secrétaire général ne va pas plus loin que cela" dans sa politique.
La Cédéao et l`Union africaine (UA), de même que l`opinion de beaucoup d`Ivoiriens vont dans le même sens. "Je ne suis pas très sûr qu`il y ait eu une autre option pour Ban Ki-moon" que de soutenir vigoureusement M. Ouattara comme il le fait, a ajouté M. Campbell.
Cette idée est partagée par Philippe Bolopion de Human Rights Watch. "Confronté au risque de violations massives des droits de l`homme, Ban Ki-moon a raison d`aller au-delà d`une diplomatie tranquille et de dire clairement à ceux qui sont au pouvoir qu`ils seront tenus pour responsables de leurs actes", dit-il.
Ban Ki-moon "n`en fait pas trop" sur la Côte d`Ivoire, estime de son côté un diplomate sous le couvert de l`anonymat. "Non, il est dans son rôle, il est le patron d`une opération de maintien de la paix avec le soutien de la communauté internationale, et en particulier des Africains".